Un voyage européen #9 – Runnymede (Angleterre)
Berceau de la démocratie moderne ?
Après la Bulgarie, nous voyageons cette semaine en Angleterre, et plus spécifiquement à l’ouest de Londres. Alors que nous parcourons la Windsor road qui va en dehors de l’autoroute M25 qui entoure la ville, nous voyons le fleuve de la Tamise à droite et une prairie à gauche.
Tournons maintenant à gauche et marchons le long d’un sentier étroit à travers la prairie qui nous mène à un monument. Vous vous demandez peut-être pourquoi un monument se trouve ici. La prairie s’appelle en fait Runnymede et ici se trouve une plaque qui dit : « Runnymede, le berceau de la démocratie moderne. » En fait nous sommes sur le lieu où la Magna Carta a été signée.
La Magna Carta (Grande Charte) est probablement un des documents politiques les plus célèbres. Signée en juin 1215 par le roi Jean sans Terre, c’était un des premiers documents affirmant que toute personne, le roi y compris, était soumise à la loi.
Mais comment cette Magna Carta a-t-elle vu le jour ? Et peut-on vraiment revendiquer qu’elle a donné naissance à la démocratie moderne ? Pour trouver une réponse à ces deux questions, nous devons jeter un coup d’œil dans l’histoire.
Les invasions normandes dirigées par Guillaume le Conquérant (roi d’Angleterre de 1066 à 1087) initièrent un processus de centralisation du pouvoir en Angleterre. Ce processus culmina sous le règne d’Henry II (1154-1189) qui gagna le contrôle de chaque sphère d’autorité.
Sous le règne du roi Richard Cœur de Lion (1189-1199), les autorités locales commencèrent à regagner un peu plus de pouvoir grâce aux longues absences du roi durant les Croisades.
Le roi suivant, Jean sans Terre (1199-1216) essaya de recentraliser le pouvoir. Ceci lui causa de se créer des ennemis dans pratiquement chaque sphère d’autorité en Grande-Bretagne, des barons locaux à l’église. Malheureusement pour lui, il était aussi confronté à des difficultés sur la scène internationale, telles que la guerre contre la France (1199-1206) et le conflit avec le pape (1206-1213), qui était à l’époque un soutien essentiel pour son autorité en tant que roi.
En réponse à la réduction de leur liberté, l’église et les barons se rassemblèrent pour former une confédération. Dirigée par l’Archevêque de Cantorbéry, Etienne Langton, ainsi que par plusieurs puissants barons du nord, tels que Robert Fitzwalter ou Eustace de Vesci, ils œuvrèrent à l’élaboration de ce qui deviendra plus tard la Magna Carta.
Lorsque le roi retourna à Londres après une défaite cuisante en Normandie lors d’une bataille contre les Français, les confédérés décidèrent de le confronter. Ils forcèrent le roi à négocier avec eux et ceci se produisit ici à Runnymede. Après plusieurs jours de négociations, le roi accepta de signer la Magna Carta le 15 juin 1215.
Comme je le disais au début, la Magna Carta déclarait que tous, y compris le roi, étaient soumis à la loi. Elle donnait également à tout homme libre le droit à la justice et à un procès équitable, ainsi que garantissait la justice pour tous. Ceci était révolutionnaire à l’époque.
On peut comprendre que Runnymede soit considérée comme le lieu de naissance de la démocratie moderne. Mais est-ce que cette revendication est correcte ? Si pas, où sont donc nées ces idées ? Pour répondre à cette question, nous devons prendre un peu de recul et regarder plus en arrière encore dans l’histoire.
Ces idées de la Magna Carta trouvent en fait leurs racines dans la Bible hébraïque qui affirme que tous les humains sont créés à l’image de Dieu. Ce concept de dignité humaine était ensuite reflété dans la Loi que Dieu donna à Moïse sur le Mont Sinaï. Au travers de la Loi, Dieu donna un cadre moral fort pour l’organisation politique et économique de la nouvelle nation d’Israël à peine libérée de l’esclavage. Comme c’était le cas avec la Magna Carta, la Loi biblique devait être observée par tous, et le roi ne faisait pas exception.
Il est évident que ces idéaux ont pénétré très tôt en Europe au travers de l’Evangile. Par exemple, au 9ème siècle, le code du roi Alfred le Grand du Wessex (Angleterre) contenait déjà les Dix Commandements, 66 versets de la loi mosaïque et la règle d’or de Jésus (toutes les choses que vous voulez que les hommes vous fassent, faites-les leur).
A l’époque de la Magna Carta, l’Europe, et donc la Grande-Bretagne, avaient été exposés au Christianisme pendant près d’un millénaire. Bien que Runnymede était une étape significative vers la démocratie moderne, son vrai berceau était en fait le mont Sinaï.
Le sécularisme moderne, avec son déni de la foi chrétienne, coupe l’Europe de ses racines qui donnèrent naissance à la démocratie. Ceci devrait stimuler et inspirer les chrétiens actuels à se tenir sur la brèche, jeter un regard nouveau sur la Bible et écrire une nouvelle Magna Carta.
À la semaine prochaine ailleurs en Europe.
Cédric Placentino
Responsable Centre Schuman pour l’Europe italienne et française
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